La ligue des femmes extraordinaires


Leur nombre exacte, je ne le connais pas. Elles sont nombreuses. Seuls les “Haïdouks de Muscel” ont eu le soutien d’au moins 34 femmes extraordinaires, telles que vous pouvez les trouver sur le site qui leur est dédié, les héroïnes de Nucșoara. Il a suffit d’une seule voix, celle d’Elisabeta Rizea, pour que la société roumaine d’après 1989, avide de modèles, reconnaisse en elle une icône de la dignité humaine, que la classe politique essaye d’utiliser son image pour ses propres intérêts, et que les détracteurs trouvent l’occasion de faire entrendre leur voix, en la contestant de manière absurde. Cette médiatisation bienvenue, appétissante pour l’usage d’un nationalisme resté comme héritage damné du régime communiste, a fait que la superficialité s’empare vite de l’image de la résistance anticommuniste féminine et nous a poussés à nous arrêter à “Tuța Rizea”, comme si l’on refusait d’apprendre plus de choses.

Même si je les connaissais toutes (ce qui, malheureusement, n’est pas le cas), j’aurais du mal à les énumérer ici. Je peux juste dire que, chaque fois que je découvre un nom nouveau, je m’arrête pour méditer à l’histoire de cette femme. Je ne rappellerai ici que cinq noms, peut-être je réussirai d’en rajouter d’autres, avec le temps.

Je commence, inévitablement, avec Elisabeta Rizea. Son histoire est assez connue, mais ses paroles le sont plus encore. Elisabeta a été une paysanne du village de Nucșoara, qui a aidé pendant plusieurs années les membres du groupe Arnăuțoiu, avec de la nourriture et des informations. Elle a été arrêtée et emprisonnée pour 6 ans, de 1951 à 1956. Ce qui est extraordinaire est le fait que, après sa libération, elle a continué à aider les “Haïdouks de Muscel”, malgré tous les risques. Les agents de la Securitate l’ont battue sauvagemment, surtout un certain capitaine Ion Cârnu, dont l’image est restée pour toujours dans sa mémoire, comme une blessure non cicatrisée. Avec la destruction du groupe, en 1958, elle a fait encore 6 ans de prison (condamnée à 25 ans de travail de travaux forcés, mais élibérée suite à l’amnistie de 1964). Le carisme d’Elisabeta Rizea, immortalisé dans la série télévisée Le mémorial de la douleur, qui lui a dédié un épisode tout entier – La vaillante de Nucșoara, l’a transformée en une icône. Même si, dans les conditions données, il y a eu d’autres femmes d’une solidarité extrême envers les frères Arnăuțoiu, comme Marina Chirca, quand on parle de ce groupe, Elisabeta Rizea sera probablement toujous citée et rappellée en premier. La réalité concrète, historique, peut ne pas la placer nécessairement en premier plan, d’ailleurs on ne peut pas parler d’une hyérarchie des mérites, mais son témoignage restera toujours une preuve de dignité individuelle, d’autant plus admirée que chacun qui s’imaginerait à sa place aurait un grand problème de conscience: Et moi, qu’est-ce que j’aurais fait?

Pour moi, le dévouement de ces femmes me fait souvent penser au seul opéra de Beethoven – Fidelio. Si Léonore est capable de se travestir pour prendre l’emploi de geôlier dans la prison où son mari est emprisoné, dans la réalité brutale des années ’50 de Nucșoara, la liberté était une notion relative. Qui était encore libre? Les gens qui n’étaient pas arrêtés mais qui étaient assiégés par les troupes des forces de repression déplacées dans cette région? Les gens des montagnes, chassés comme des animaux et menant une vie extrêmement dure? Les gens emprisonnés, détachés et isolés de cette vie? Un Fidélio sans happy end. Personne n’est sauvé à la fin. Il y a aussi un chœur de la souffrance, mais il ne chantera jamais O welche Lust… Et quand même, la solidarité d’une communauté, déployée sur presque 10 ans, pendant lesquels le risque de payer avec sa propre vie était clair depuis le début, est digne de la musique de Beethoven…

Et un dernier détail. Malgré la notoriété d’Elisabeta Rizea, vous ne trouverez nulle part une photo de son Némésis, cet Ion Cârnu qu’elle rappelle chaque fois. Par ailleurs, vous ne trouverez aucune photo de cette femme quand elle était jeune. Bien qu’Elisabeta parle obstinemment de sa jeunesse, (“J’étais différente à 38 ans… […] Regarde-moi dans cette photo les cheveux drus que j’avais, et le collier en or…“) en contraste avec son image telle que tout le monde la connaît, (“Je vis avec ce corps tordu maintenant, avec les genoux à l’extérieur“), il semble que personne ne s’est posé la question: Comment était cette femme quand elle faisait ce qu’elle faisait, et non pas maintenant, quand elle nous raconte? Eh bien, Elisabeta-Léonore était comme cela:

Elisabeta Rizea

Elisabeta Rizea

Son témoignage a été enregistré dans un livre d’exception, écrit par Irina Nicolau, avec le témoignage de Cornel Drăgoi, fils de l’un des 4 prêtres du lot Arnăuțoiu, exécutés pour avoir fait ce qu’ils prêchaient, c’est à dire avoir aidé leur proche. Le livre s’appelle: L’histoire d’Elisabeta Rizea de Nucșoara, suivie par le témoignage de Cornel Drăgoi, pour plus de détails sur ses diverses versions aux éditions Humanitas, vous pouvez consulter ce lien avec un preview. La version presque complète de l’interview peut être trouvée dans le  scénario écrit par Rodica Mandache pour la représentation de ce témoignage au théâtre.

Je resterai au cas Arnăuțoiu, car, si l’on a déjà parlé de la loyauté des femmes qui les ont aidés, il est nécessaire de parler aussi de la femme qui a fait effectivement partie du groupe des “Haïdouks de Muscel” pedant toute son existence. Il s’agit de Maria Plop.

Cette femme n’a pas survécu à la repression, elle est morte dans la prison de Miercurea Ciuc, en 1962. Elle ne racontera jamais sa vie dans les montagnes, pendant 10 ans, ou sa vie d’avant cela. Ses déclarations pendant l’enquête sont lapidaires et, presque sans doutes, contrefaites. Les déclarations des témoins qui l’ont connue sont elles-aussi, inévitablement, subjectives. L’interprétation officielle faite par les autorités de l’État roumain est odieuse et  révoltante. On sait qu’elle est venue de Moldova, d’un village près de Iași, chassée par la guerre et la famine. Qu’elle a travaillé comme homme de peine dans la cour de la famille Arnăuțoiu. Qu’elle est partie avec les deux frères dans les montagnes, où on l’a vue souvent avec une arme à la main. Qu’elle a pris part aux actions du groupe, surtout aux actions politiques, en détruisant les portraits des camarades  à la tête du Parti Communiste Roumain, affichés de manière ostentatoire dans les endroits les plus inappropriés: dans une cabane touristique des Montagnes Făgăraș ou dans des entrepôts de bois, complètement ridicule! On sait aussi qu’elle a eu une fille avec Toma Arnăuțoiu. Apparemment, un personnage énigmatique, on aurait pu vite l’oublier. Mais le destin n’a pas voulu laisser les choses comme cela.

Maria Plop și Ioana Arnăuțoiu

Maria Plop și Ioana Arnăuțoiu

La fille qui a été internée dans un orphelinat et puis a été adoptée a appris sa vraie histoire. C’est grâce à cette fille que l’on sait aujourd’hui un si grand nombre de choses (mais, quand même, pas assez) sur l’histoire de ce groupe, qui a la plus longue vie en termes de longueur d’activité dans l’hsitoire de la résistance dans les montagnes. Plus que l’histoire proprement dite, je me sens impressionné par le récit de cette recherche. De ce chemin vers la récupération de la mémoire.

Il y a un opéra de Giuseppe Verdi, l’un des plus profonds et  des plus intéressants de tous ses opéras, dans lequel l’un des personnages féminins n’apparaît pas du tout sur scène, elle n’a aucune note à chanter, mais, malgré tout cela, l’opéra est traversé d’un bout à l’autre par son souvenir. Depuis un moment, quand j’écoute cet opéra, Simon Boccanegra, je ne peux pas m’empêcher de penser à ce personnage. Maria Boccanegra est morte déjà au début de l’opéra. Mais elle vit encore dans les cœurs des autres par sa fille, tout au long du drame. Une fille, Amélia (les coïncidences continuent), perdue, adoptée et qui découvre ses origines 20 ans plus tard. Et comme toutes les choses qui ne sont pas dites, qui ne sont pas connues et ne sont pas comprises peuvent être remplacées par la musique, le silence de Maria Plop peut être comprise aussi de cette manière, par les sons d’un prélude-ouverture ou ceux du duo final du pardon

Mais Maria Plop n’a pas été la seule femme partie dans les montagnes, il y en a eu d’autres. Et elles ne méritent pas de se perdre dans l’oubli, surtout que certaines d’entre elles ont échappé et ont pu nous raconter leurs vies. L’un des témoignages les plus émouvants est celui de Lucreția Jurj, membre du groupe de Teodor Șușman de Răchițele. Lucreția, que ses collègues de prison appellait “Moțoaica”, était une jeune paysanne de la région de Huedin, qui a épousé un garde forestier, Mihai Jurj. Celui-ci aidait les membres du groupe Șușman jusqu’au moment où il est devenu suspect dans les yeux de l’autorité de l’État roumain. Au moment où la Securitate a confisqué son arme, Mihai a compris que son arrestation était devenue une question de temps et il a décidé de joindre le groupe. Et Lucreția décide sur le coup de suivre Mihai dans son calvaire, en l’aimant comme une folle jusqu’au moment où, pour de vrai, la mort les a séparés. Après 1989, elle a parlé de toutes ces quatre années passées dans les montagnes, son interview a été publiée dans un volume, On ne donne pas la souffrance aux frères (Suferința nu se dă la frați), auteurs Cosmin Budeancă et Cornel Jurju, dont on prépare une nouvelle édition. Vous trouverez ici des détails sur le livre, et j’espère y introduire la nouvelle version le plus vite possible.

L’histoire de Lucreția est d’une simplicité désarmante, et toutes les décisions qui aujourd’hui nous paraissent effrayantes deviennent les plus normales. Et, en dessus de tout cela, un amour immense: pour moi, toute l’interview (avec une valeur historique importante, sans doute) a été une longue déclaration d’amour pour son mari, dont elle garde en tête une dernière image, celle du chemin vers la prison, en agonisant suite aux coups reçus pendant l’arrestation. Et quoi d’autre pourraient être ces mots qu’une déclaration d’amour?

Moi, je pense à Mihai tout le temps. J’ai eu une photo de lui, militaire, que j’ai gardée longtemps. […]
Après ’90, j’ai repris mon nom de famille, Jurj, car c’est avec ce nom que me connaissaient les gens. […] Qu’est-ce que j’ai aimé reprendre ce nom de Jurj! Car Mihai est resté pour toujours dans mon cœur. Oui, Mihai, il a été un homme très bon, un enfant sans mère… […]
J’étais très heureuse quand j’allais avec Mihai dans les montagnes, vers les chaumières où il y avait des vaches et des moutons. Et puis les filles jouaient du cor des montagnes et moi, j’étais si heureuse. J’étais au septième ciel. […] J’ai été très attachée à Mihai et très proche de son cœur. C’est pour ça que je suis partie avec lui et que je n’ai aucun regret. J’aurais regretté si je ne l’avais pas suivi dans les montagnes. Je n’aurais pas trouvé ma paix si je l’avais abandonné. Car lui aussi, le pauvre, même dans les moments les plus difficiles, il avait besoin de me voir. C’est pour ça qu’en ’50, le chef du parc forestier a dit aux gens de la Securitate «de ne pas me perdre des yeux, car mon mari m’aime et il viendra à la maison». Qui sait où ils l’ont jeté après sa mort… Sans bougie, sans rien. Chaque fois que je vais à l’église, je brûle une bougie pour lui. Ainsi, je suis tranquille, car j’ai fait mon devoir de vraie femme. Je suis partie avec lui dans les montagnes et j’étais prête à donner ma vie pour lui…

Tout simplement romantique, et moi, quand je lis ces paroles, je me rappelle Donizetti et sa musique, ses heroïnes folles. Lucia di Lammermoor, par exemple. Un opéra dans lequel Lucia arrive à tuer pour ne pas être séparée de son amoureux. Et toute l’atmosphère tragique et toute la fatalité paraissent si semblables. Et les paroles de Lucreția, qui se souvient de toutes les douleurs, sont comme un long  Soffriva nel pianto 

On n’aurait pas capitulé, ça c’est clair. Mon mari aurait été capable de se suicider, mais moi, il ne m’aurait jamais tuée. Mihai n’aurait jamais capitulé vivant. Nous n’avons pas pensé à capituler, car nous connaissions notre sort. Ils n’étaient pas contents avec ce que tu disais, ils te forçaient pour dire tout ce qu’ils voulaient, puis ils te condamnaient à mort. Bon, moi, ils ne m’auraient pas condamnée à mort, car je n’avais pas tiré. Si j’avais dit que j’avais tiré… D’ailleurs, lors du procès, ils m’ont demandé: «Tu étais armée?» «Oui, bien sûr.» «Et pourquoi étais-tu armée si tu n’as pas utilisé ton arme?» «Mais, je portais une arme pour ne pas laisser les deux à mon mari!» Il avait une carabine, un ZB et un fusil de chasse. Comment aurait-il pu porter trois armes… J’aimais la carabine, car elle était plus petite. Je la démontais, je la nettoyais.

Je parie que vous ne trouverez pas facilement une photo de cette femme dans sa jeunesse, sur Internet. J’en ai une, depuis l’époque quand elle était jeune et heureuse, avant de partir dans les montagnes, voilà Lucreția – Lucia:

Lucreția Jurj

Lucreția Jurj

A part le livre déjà mentionné, On ne donne pas la souffrance aux frères, vous pouvez lire ici une interview, la dernière qu’elle a donnée, un peu avant son départ pour rejoindre pour toujours son mari, Mihai. Voilà l’intreview: Lucretia Jurj – Interviu, revista Memoria, 2004.

Toujours en Ardeal, on retrouve l’histoire d’une autre femme extraordinaire, Aristina Pop. Un ange. Elle était encore enfant quand son père a sauvé une famille de Juifs  de la déportation, en les cachant dans la forêt pour quelques années. Cet exercice d’humanité aurait dû recevoir une autre récompense de la part de la vie. Mais, après la guerre, son père, Nicolae Pop, a répété le geste de solidarité et il a aidé 3 fugitifs anticommunistes à échapper leurs  poursuiveurs. Les autorités sont intervenues comme d’habitude, c’est à dire de manière très dure. L’arrestation du garde forestier Pop a échoué, Aristina (de 18 ans) et son frère, Achim, le suivent dans les montagnes, pendant que le reste de la famille (au total 15 personnes) est déportée dans le Bărăgan. Aristina a été capturée en 1953, après presque 4 ans de poursuite. Elle est restée en prison jusqu’en 1964. En 1996, la famille Marmor, sauvée de l’Holocauste, inscrit les noms des Pop et le nom d’Aristina dans le Yad Vashem.

Aristina a, elle aussi, un livre de souvenirs, qui s’appelle Vivent les partisans jusqu’à l’arrivée des Américains! (Să trăiască partizanii până vin americanii!), que vous pouvez encore trouver ici. Le récit sur la perte de l’innocence et puis de l’espoir, la rémémoration de la tragédie de la perte de la famille sont plus que troublantes. Et moi, quand je lis et relis son histoire, je vois un ange. Et son innocence peut être chantée, comme l’innocence d’un personnage d’opéra verdien. Aristina est Gilda de Rigoletto, avec toute la tristesse de Tutte le feste al tempio

Et les photos… elles valent vraiment plus que 1000 paroles! Je sais deux images qui doivent être mises l’une à côté de l’autre. La première est faite après l’arrestation. La deuxième, après l’élibération. Voilà Aristina – Gilda:

Aristina Pop

Aristina Pop

Aristina Pop

Aristina Pop

Vous pouvez trouver ici des fragments du livre mentionné: Vivent les partisans jusqu’à l’arrivée des Amércains!, dont je vais reprendre quelques mots d’Aristina:

J’étais au lycée, à Dej. Evidemment, je n’étais pas très bonne à l’école, car je pensais à ma famille tout le temps… Je ne savais pas ce qui allait se passer avec eux. Depuis le moment quand l’ Ardeal du Nord avait été cédé à la Hongrie, pendant la persécution des Juifs, mon père avait sauvé huit Juifs, parmi lesquels une famille avec trois enfants, un de 2 ans, un autre de 6 ans, un troisième de 8 ans. Depuis que j’avais 13 ans, j’ai eu toujours peur, car je portais des vivres aux Juifs, dans les montagnes. Moi et un frère à moi, pour ne pas paraître trop évident… Les Juifs étaient dans notre commune, avec les gendarmes hongrois, mais ils ne vérifiaient pas tous les coins à la recherche des partisans, comme a fait la Securitate plus tard. Les montagnes étaient pleines de partisans russes, il y avait aussi des déserteurs roumains de l’armée hongroise… il y avait aussi un beaux-frère à moi, qui avait fui l’armée. Eh bien, les Allemands et les Hongrois venaient chez nous, ils rencontraient d’autres des autres parties de Maramureş, de Someş, et puis ils partaient, chacun à son unité. Ils ne se dispersaient pas dans les montagnes, pour chercher les déserteurs. Après 1947-1948, la situation a changé. La Securitate est venue,  et, selon moi, elle a été unique dans son genre. Tous les securistes ont fait irruption chez nous. Je venais d’arriver du lycée, de Dej, pour prendre de la nourriture. C’était le 11 mai…

La dernière femme que je veux présenter ici est Marioara Cenușă, de Putna, Bucovina. C’est l’une des premières héroïnes de la résistance anticommuniste. Elle a payé avec un trop grand nombre d’années le fait d’avoir suivi son mari avec un dévouement pris dans la littérature romantique. Et son talent pour raconter est exceptionnel. Je pense souvent au fait que le talent de Ion Creangă n’a pas été singulier et seulement le hasard nous a privés du plaisir de connaître d’autres conteurs.

Les souvenirs de Marioara sur son mari sont les plus belles paroles écrites sur le dévouement: “Je le lave avec soin, je lui donne la plus belle chemise, cousue avec un modèle traditionnel, toute noire, je lui donne une touloupe en popeline, aussi cousue avec un modèle traditionnel, très beau, un chapeau bleu marin. Mais je pleure à en mourir. Je lui donne des chaussures neuves.

Il dit: «S’il te plaît, arrête de pleurer comme ça, sinon je te flanque une pile…! Tu ne vas pas pleurer toute ta vie pour moi. Tu es une femme très bonne; tu sais te conduire bien avec ton homme; tu sais apprécier son travail; tu t’y connais pour les choses de la maison. Ne prends pas un homme bête, car c’est dommage pour toi et ton cœur bon et doux. C’est dommage pour ta sagesse et ton zèle. Je t’en supplie, ne prends pas un idiot. S’il y a un autre monde, alors là aussi, je pleurerai après toi. Mais si le sort a décidé que je meure innocent, alors je dois mourir. J’ai beaucoup aimé la vie et je pensais ne jamais mourir. Mais l’heure a sonné pour moi; j’attends d’une minute à l’autre les balles, avec sang froid. C’est ce que mes ennemis veulent pour moi: maison vide, femme veuve et pauvre.»

Il me prend dans ses bras, il m’embrasse de tout son cœur et me dit: «Ma chère femme, je te suplie de me pardonner. Peut-être j’ai eu tort parfois envers toi, mais ce n’était pas de ma faute. C’était à cause des ennemis qui nous enviaient car on vivait trop bien.» Mais moi, je pleure à sanglots.

Le reste est ici, dans ce document exceptionnel: Maria Cenusa – Le début de la souffrance (Inceputu amarului).

Et pour moi, le dévouement de Marioara Cenușă est celui d’un personnage d’un opéra de Giacomo Puccini, Minnie de La Fanciulla del West, une femme capable de jouer au poker la carte de sa vie pour sauver son amoureux, “Una partita a poker“.

Je m’arrête ici pour le moment. Cet article n’est pas nécessairement une galerie de tableaux, ni un exercice d’éloquence. C’est un article sur la beauté de l’être humain, rendue encore plus exaltante par l’hypostase féminine. Par solidarité, par la transcendance du souvenir, par l’amour, l’innocence et le dévouement. Et la comparaison avec les personnages des opéras est le compliment que je peux faire, en toute humilité, à la mémoire de ces femmes extraordinaires. Je rajoute seulement le fait que dans quelques jours, le 28 juin, 100 ans seront passés depuis la naissance d’Elisabeta Rizea, il n’est jamais trop tard pour s’en souvenir…

2 răspunsuri la La ligue des femmes extraordinaires

  1. a. zice:

    Mulțumiri!

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